• Universite d'Ete du NPA, les invité(e)s...

     

    Des rencontres, vous en ferez sur tous les sujets et des invitéEs, il y en aura de partout. Car notre université d'été est avant tout un espace d'ouverture où le NPA noue le dialogue avec des personnalités, des spécialistes, et des militantEs de tous les horizons.

    Cette année, Daniel Mermet, célèbre animateur radio de l'émission « Là-bas si j'y suis » sur France Inter, sera parmi nous. Compagnon de route depuis de nombreuses années de la contestation en tout genre, il nous fera partager ses nombreuses expériences et la vision de son métier de journaliste.

    Autre personnalité en lutte contre le prêt-à-penser, Marie-Monique Robin, journaliste, écrivain et réalisatrice de nombreux documentaires, viendra nous présenter deux d'entre eux : le dernier en date « notre poison quotidien » consacré à la mal-bouffe et aux poisons dans nos assiettes, ainsi qu'un documentaire plus ancien consacré à l'aide accordée par l'état français aux dictatures sud-américaines. Et elle n'oubliera pas non plus de nous parler de l'agro-business et des OGM auquel elle avait consacré un fameux documentaire « le monde selon Monsanto ».

    L'expertise n'empêche pas le militantisme, et nous pourrons ainsi profiter de l'éclairage engagé de différents invités. Ainsi, le sociologue Said Bouamama abordera avec nous lors de différents ateliers les problématiques liées à la lutte contre les discriminations, en particulier dans les quartiers. Eric Toussaint, animateur du CADTM, nous expliquera les ressorts de la dette au Nord comme au Sud et de comment nous pouvons résister à ce piège. Daniel Tanuro, ingénieur agronome et militant belge pour l'écosocialisme, viendra nous parler entre autre de la question centrale des ressources énergétiques et nous présenter son dernier livre « l'impossible capitalisme vert ». Kaissa Tissous, spécialiste de la question du logement dans les quartiers populaires, interviendra sur ce thème. Et aussi Gerard Filoche; Xavier Mathieu ...

    Dans le cadre de la Société Louise Michel présente à notre université d'été depuis la première année, ce sera aussi la variété des disciplines et des savoirs. Gus Massiah, figure centrale du mouvement altermondialiste, Edwy Plenel, fondateur de Médiapart, Elizabeth Claverie, directrice à l'EHESS en anthropologie, Luc Boltanski, sociologue, Claude Calame, spécialiste de la Grèce antique... ils seront tous présents à Port Leucate. De la question stratégique aux passions religieuses, de l'Etat et des institutions à la révolte, les sujets seront nombreux et variés. Et il y aura même une soirée spectacle jouée par des comédiens professionnels autour de textes de Daniel Bensaid.

    Et pour celles et ceux à qui cet inventaire – incomplet - ne suffit pas, précisons enfin que cette année encore il faudra être sérieusement polyglotte. Des invités tunisiens et égyptiens pour nous parler des révolutions du monde arabe, un militant de la cause paysanne venu du Bangladesh, des militantEs de la gauche anticapitaliste européenne (dont notre camarade Esther Vivas de l’État espagnol) pour nous faire vivre les résistances internationales aux politiques d'austérité. Mais que l'on se rassure, les traductions seront toutes assurées.

    Vous l'aurez compris : le meilleur endroit pour faire les plus belles rencontres de l'été, ce sera cette année encore l'université d'été du NPA. On vous y attend


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  • Sortir en moins de 10 ans du nucléaire : oui c’est possible !

     

    Tout d’abord parce que c’est parfaitement réalisable !

    Cela doit résulter de la conjonction de deux facteurs ; d’un côté la baisse de la demande en électricité par une politique de sobriété (rénovation de l’habitat, refus du gaspillage...) et d’économies, et de l’autre côté un développement massif des énergies renouvelables (ER). Pour y parvenir, les obstacles ne sont plus techniques, tant les innovations en matière d’énergies renouvelables et de stockage ont été importantes ces dernières années, mais politiques et financiers.

    En France comme ailleurs, la logique capitaliste est le principal obstacle à cette nécessaire révolution énergétique. Les industriels de la filière s’accrochent encore à leur phénoménale source de profits et bénéficient d’appuis politiques à droite comme à gauche. Malgré l’horreur de Fukushima, les partis de gouvernement (UMP, PS) sont toujours clairement pour continuer le nucléaire (voir le programme du PS sur son site).

    De son côté, le parti dit « écologiste » se prononce pour une sortie du nucléaire en 25-30 ans : ce choix présenté comme raisonnable est manifestement dicté par le souci d’une compatibilité électorale avec le Parti socialiste pro-nucléaire.

    Mais demander la sortie en 25-30 ans, c’est donner raison à EDF qui réclame le prolongement de ses réacteurs pour cette durée, et c’est aussi accepter le prolongement du nucléaire jusqu’au moment où l’uranium commencera à manquer. C’est une imposture irresponsable !

    Quant à la majeure partie des grandes associations écologistes, toutes engluées dans l’imposture du Grenelle de l’environnement où se joue la distribution des subventions, elles restent bien discrètes sur le sujet.

    Il y a urgence absolue

    Après la catastrophe de Fukushima où rien n’est définitivement sous contrôle, et malgré les efforts des travailleurs japonais pour empêcher un désastre encore plus grand, l’humanité est toujours sous la menace du pire. Cette tragédie a révélé au monde de façon encore plus évidente l’urgence absolue de se mettre à l’abri des méfaits du nucléaire. Accidents aux conséquences gravissimes, effets de la radio-activité sur la santé, production de déchets hautement nocifs et ingérables, énormes difficultés pour le démantèlement des centrales, pollution des rivières indispensables au refroidissement des réacteurs, production d’armes nucléaires... les raisons de sortir du nucléaire sont multiples.

    Il faut une voix pour le crier et dire qu’il est tout à fait possible de sortir rapidement du nucléaire. C’est pourquoi celles et ceux qui ont choisi de se rassembler au sein du NPA pour lutter contre le capitalisme et aussi contre le nucléaire, ont décidé de s’y atteler.

    Sortir du nucléaire et lutter contre l’effet de serre : deux objectifs parfaitement compatibles

    La sortie du nucléaire doit se faire en tenant compte de la problématique énergétique globale et notamment de l’effet de serre et doit donc viser à minimiser autant que possible le recours aux énergies fossiles.

    Comme on le verra, notre scénario ne constitue pas un obstacle à la réalisation de l’objectif de réduction des émissions de CO2 dès lors qu’aucun recours supplémentaire à l’énergie fossile ne sera nécessaire. Par contre nous faisons effectivement appel au système dit de « cogénération » dont une partie est émettrice de gaz à effet de serre. Mais cette part est minime et transitoire car au-delà de dix ans, le prolongement de notre scénario permet une baisse très rapide de tout recours à ce type d’énergie.

    D’autre part, l’ensemble de ces projections est à inclure au sein d’une logique beaucoup plus globale de baisse d’émission de CO2 notamment au niveau des transports, principal facteur émetteur.

    Il s’agit bien ici d’un scénario de sortie du nucléaire simple. Dans un souci de crédibilité totale, il se fonde sur des hypothèses réalistes qui prouvent que sortir du nucléaire en dix ans est possible. Mais ces hypothèses sont minimalistes. Il est évident qu’il est possible de faire encore mieux et d’éviter ainsi rapidement le moindre recours à toute production émettrice de gaz à effet de serre.

    Contrairement à ce que véhicule une partie du mouvement écologiste traditionnel qui a tendance à faire la morale aux travailleurs sans s’en prendre aux vrais gaspilleurs, nous pensons qu’il est possible, sans toucher le confort de vie, mais en étant toutefois « raisonnable », d’arriver en dix ans maximum à une situation où la production d’électricité sera majoritairement issue des énergies renouvelables et la part d’énergies fossiles stabilisée amorcera sa baisse.

    Nous disons dix ans maximum car en réalité nous pourrions aller encore plus vite en supprimant ou en réduisant fortement certaines industries inutiles et voraces en énergie comme l’armement, une partie la chimie, de l’agroalimentaire.

    Notre scénario nécessite certes une véritable révolution énergétique, mais le territoire français possède tous les atouts : énormes potentiels dans les domaines éolien (sur terre et en mer), le solaire, le bois, l’hydraulique, l’hydrolien, etc. Les chiffres présentés ici montrent dans quels secteurs des économies d’énergies sont possibles et les potentiels en énergies renouvelables.

    Réduction de la consommation électrique (potentiel annuel atteignable dans dix ans) :

    Consommation électrique nationale annuelle selon l’Insee : 485 TWh* en 2009

    - Les pertes en ligne et la consommation des centrales : l’industrie nucléaire consomme une partie non négligeable de sa production, notamment du fait de son hypercentralisation et pour l’enrichissement de l’uranium. Un arrêt de la production nucléaire économiserait autour de 30 TWh. De plus, on estime que 12 % de l’énergie électrique est perdue dans les lignes haute tension et à cause des transformateurs en surchauffe. Ces pertes peuvent être réduites d’un tiers en dix ans par la baisse de la consommation, la modernisation de certains équipements (transfos) et la décentralisation des modes de production soit 6 TWh.1

    - Chauffage : en France, au moins 30 % des foyers sont équipés de chauffage électrique (contre 5 % seulement en Allemagne). Le chauffage électrique est une aberration (1W électrique consommé nécessite de « brûler » 3W thermiques dans une usine!).

    Leur remplacement progressif, avec un vaste programme d’isolation de l’habitat, la production de poêles à granulés, l’usage de la géothermie, l’installation de chauffage central en cogénération (où la chaleur émise permet de produire en même temps de l’électricité) permettraient une économie de 30 TWh minimum2.

    - Renforcement des normes des appareils électriques (réfrigérateurs, veille...) : 11TWh peuvent être économisés facilement (chiffres réseau sortir du nucléaire - RSN).

    - Éclairage domestique et public : obliger les entreprises et les collectivités à réduire leurs éclairages, et équiper les foyers particuliers de lampes basse consommation et en appareils économes doit permettre une économie de 19 TWh (chiffres agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie - Ademe).

    - Industrie et commerces : l’aveuglement capitaliste est intrinsèquement gaspilleur. Bien qu’ayant fait certaines économies durant les années 1970-1980, l’industrie s’est largement remise à dilapider l’électricité notamment du fait de la tarification toujours trop basse qui lui est appliquée et provoque du gâchis. Nous proposons la suppression immédiate des panneaux de publicité lumineux, des normes sur le froid industriel, la suppression progressive de la climatisation, l’amélioration de l’isolation des locaux anciens et la mise en place de normes bioclimatiques sur les nouveaux. Pour les grosses entreprises, une véritable politique de sobriété énergétique qui s’appuierait sur la socialisation de larges pans de l’économie, entraînerait la mise en chantier de moyens de production propres (micro-éoliennes et panneaux solaires sur les toits des grandes surfaces...). L’économie potentielle est d’au minimum 20 TWh.

    Économies totales : 116 TWh

    Notre consommation pourrait donc se réduire pour atteindre : 485 – 116 = 369 TWh

    Il faut préciser que ces chiffres sont des minima, bien d’autres études étant plus ambitieuses

    Offres en énergies non nucléaire (potentiel annuel atteignable dans dix ans)

    Actuelle production non nucléaire nationale : 132 TWh

    Dont : - 70 TWh renouvelables (60 hydraulique + 10 éolien et solaire)

    - 62 TWh thermique (sur un potentiel actuel de 160)

    Pour satisfaire la consommation sans le nucléaire, il nous faudra donc trouver en production :

    369 – 132 = 237 TWh en moins de dix ans

    Répétons-le : les chiffres que nous avançons ci-dessous résultent d’hypothèses basses et raisonnables. Dans ces hypothèses, des problèmes liés à l’intermittence de la production électrique par les renouvelables pourraient se produire à la marge dans la période de transition de dix ans.

    Dès lors, un choix de société pourrait s’imposer, visant à réduire ponctuellement certaines productions industrielles particulièrement énergivores.

    Dans une société démocratique digne de ce nom, ces choix feraient l’objet d’une concertation entre travailleurs et usagers et constitueraient une occasion supplémentaire de remettre en cause le productivisme auquel nous sommes collectivement et culturellement soumis.

    En tout état de cause, une politique d’investissement encore plus volontariste que celle que nous proposons est possible et permettrait en la liant aux nouvelles techniques de stockage (voir infra stockage), d’éviter toute rupture de l’approvisionnement nécessaire.

    - Grand éolien :

    Ce secteur a connu des évolutions technologiques majeures et continue à en connaître. Actuellement la majeure partie des éoliennes installées développent une puissance de 2 à 2, 5 MW. Une nouvelle génération d’une puissance de 5MW est en cours d’installation notamment dans les pays nordiques et le prototype de 10 MW est opérationnel. D’après l’Ademe, en moins de trois mois, une éolienne produit l’équivalent de l’énergie qu’il a fallu pour la fabriquer, l’installer et la démanteler !

    L’exemple allemand montre qu’un rythme de 3 800 MW par an peut être atteint. On obtient alors en dix ans 38 000 MW, soit une énergie produite annuelle de 68, 6 TWh3.

    - Éolien off-shore :

    Le potentiel est gigantesque. Les vents en mer, plus réguliers et plus puissants permettent une production de 16 000 MW en dix ans, soit 56 TWh à raison de 3 500h/an.

    m Micro-éolien : les petites éoliennes étant maintenant suffisamment silencieuses, il devient possible d’en installer sur les toits en milieu urbain ou sur des sites isolés. En systématisant l’installation de ces micro-centrales (10 à 50Kw) dans les constructions neuves, sur les toits des centres commerciaux, etc. on peut arriver à un apport de 3, 5TWh en dix ans.

    - Micro-hydraulique : les grandes installations (barrages) ne peuvent plus être développées sans mettre en péril les divers écosystèmes ainsi que les modes de vie des populations. Par contre l’implantation d’unités de production micro-hydrauliques (inférieures à 1 MW) est encore tout-à-fait possible et permettrait d’installer jusqu’à 9TWh4.

    - Solaire : le potentiel de cette énergie est considérable: 8 000 à 10 000 fois la consommation actuelle de l’humanité. En capter une infime partie permettra demain de résoudre la majorité des problèmes énergétiques dans lesquels nous sommes englués.5

    Dès aujourd’hui et à moyen terme, l’énergie solaire peut représenter une contribution importante à nos besoins en électricité. En France, 100 km2 environ sont bâtis par an. Si on impose que toute construction neuve dispose de panneaux photovoltaïques (ou de chauffe-eau solaires), et ce sur un cinquième des surfaces bâties pour des raisons pratiques (encombrement, accessibilité), on arrive à un total de 18, 6 TWh. De plus sur le bâti ancien en programmant 350MW/an (comme par exemple en Allemagne ces dernières années) on parvient à 5, 6 TWh en dix ans.

    - Énergie de la mer : le potentiel est là aussi gigantesque. Il existe en France des projets très sérieux de développement d’hydroliennes (éoliennes sous-marines) qui permettraient d’utiliser les courants sous-marins. L’Écosse et l’Angleterre sont déjà au stade de la production d’électricité grâce à des « serpents de mer » qui utilisent l’énergie des vagues pour produire de l’électricité. Ce potentiel est évalué par EDF à 14 TWh, ce qui semble réellement un minimum au regard de la puissance phénoménale des mers6.

    - Cogénération : pour l’instant utilisée a minima dans l’industrie et les grands réseaux de chaleur, la cogénération, qui consiste à produire de la chaleur et en même temps de l’électricité, peut être largement développée en s’appuyant sur la filière bois. Le bois est une ressource encore sous-exploitée en France et constitue un combustible alternatif au fioul ou gaz dans les chaufferies. Une bonne exploitation des forêts favorise leur régénération, participe à la lutte contre les incendies.

    La production de chaleur et d’électricité peut être obtenue par des moteurs à gaz ou diesel (potentiel minimum de 12 TWh), des turbines à gaz ou à vapeur, et la pile à combustible ou à partir de bois ou de biogaz (potentiel minimum de 18 TWh). Enfin, le remplacement des chaudières à gaz ou au fioul dans l’habitat par des installations de cogénération pourrait produire un minimum de 35 TWh (chiffres RSN).

    À noter que l’impact carbone supplémentaire induit par la cogénération serait minime (car assise essentiellement sur l’énergie bois) et transitoire car annulé rapidement par le développement des énergies renouvelables.

    - Utilisation de la totalité des installations hydrauliques actuelles (sans création de nouvelles unités): 80 TWh au lieu de 60 soit 20TWh.

    Laurent Grouet et Claude Kaiser

    * 1 terawatt-heure (twh) = 1 000 gigawatts-heure (gwh) et 1 000 000 megawatts-heure (MGh)

    1. http://mathiaslaffont.files.wordpress.com/2011/01/rdv-tel-27_04_09.pdf

    2. http://www.greenpeace.org/raw/content/fr... . C.f le scénario sub 5 % du document en en déduisant 10Twh liés à l’isolation

    3. http://www.thewindpower.net/fiche-pays-2...) Pour 1600 heures/an, qui correspond à une implantation sur une grande partie du territoire et en comptant les 8, 6TWh déjà installés et en convertissant la puissance (en W) en énergie produite/consommée (en Wh) : une installation de 38 000MW qui fonctionne 1600 h par an produira : 38 000 x 1600 =

    60 800 000 de MW/h soit 68, 6TW/h annuels.

    4. Rapport d’Yves Cochet http://www.tecsol.fr/cochet/cochet.htm).

    5. http://www.futura-sciences.com/fr/questi...

    6. http://www.nanodata.com/sdn76/epr3/doc/analyse-energie-des-mers.pdf

    1. http://www.photeus.info/spip/article_028.html)
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  • Le FN est-il en train d’évoluer vers une droite républicaine un peu musclée, comme le disent certains commentaires ?
    Je crois que l’on assiste à la tendance exactement inverse. Le FN version Jean-Marie Le Pen avait quelque chose de folklorique, puisque son programme alliait la stigmatisation des immigrés et le libéralisme économique (dénonciation du «fiscalisme», des fonctionnaires, etc.). A partir du moment où il associe xénophobie et étatisme, il se rapproche des fascismes d’avant-guerre. Il était national et libéral, le voici national et social, et c’est pour ça que, lors de la présentation du sondage sur le protectionnisme, j’ai spontanément établi une comparaison entre le FN et le nazisme. Cela dit, il y a des choses qui bougent et, en tant qu’historien du présent, j’essaie de comprendre ce qui se passe, sans partir du principe que je comprends tout ce qui se passe - ce qui me distingue de certains. Je constate que, d’un côté, le FN est dans le système, mais que, de l’autre, il possède une potentialité «hors système» qui peut être très dangereuse - d’autant plus dangereuse qu’elle converge avec des tendances fascisantes à l’intérieur même de l’UMP. En 1932, le parti nazi était de la même façon hors et dans le système. Nous n’en sommes pas là, mais il faut agir avec à l’esprit tous les scénarios, dont celui du pire.
    Des tendances fascisantes à l’UMP ?
    Pour moi, aujourd’hui, le danger vient moins du FN que de l’émergence, dans la droite dite classique, de tendances protofascistes, comme les historiens parlent de proto-industrie. Depuis quatre ans, l’impulsion des campagnes anti-immigrés, antiRoms et anti-islam a été donnée par le gouvernement. Les thématiques ethnique et autoritaire, c’est bien le sarkozysme qui les a portées. La stratégie, si caractéristique du fascisme, consistant à dire une chose et son contraire - par exemple, à se dire de gauche et de droite à la fois, ou à mélanger le social et le national - existe certes au FN, mais encore plus dans les discours écrits par Henri Guaino, où Nicolas Sarkozy en appelle aux figures historiques de la gauche au moment même où il confère des avantages fiscaux aux plus riches. Aujourd’hui, il délègue à Claude Guéant la charge de faire des «clins d’œil» à l’électorat frontiste. Pourquoi soupçonner toujours les gens de cynisme ? Peut-être est-il sincère, peut-être est-il d’extrême droite.

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  • Un possible intempestif

    Le dernier livre de Daniel Bensaïd est un projet qui remonte à 2004 et auquel il travaillait encore les mois qui précédèrent sa mort (12 janvier 2010). C’est un travail inachevé, mais d’une très grande richesse, ouvrant de nombreuses pistes de recherche. Comme l’observe René Schérer dans sa préface, son écriture est interrogative, pressée, ardente, comme emportée par l’urgence, dans l’inquiétude d’une mort tragiquement trop prochaine.

    On pourrait dire que le fil conducteur est une esquisse de « généalogie du désespoir », une analyse critique des pensées qui semblent considérer — fût-ce pour le déplorer — que la domination du capitalisme n’a aucune limite.

    Peut-on rompre avec cette domination par simple refus de la servitude volontaire (selon la classique définition d’Étienne de La Boétie) ? S’inspirant de l’ouvrage (« la Révolution ») d’un socialiste libertaire — méconnu — du début du siècle, Gustav Landauer, Daniel observe lucidement : on peut échapper à la servitude volontaire en chassant le tyran de sa tête, on ne peut briser l’assujettissement involontaire au despotisme impersonnel du capital que par la lutte de classes.

    Tandis que Herbert Marcuse posait encore en 1964 la bonne question — « est-il encore possible de briser le cercle vicieux de la domination ? » — Michel Foucault se situe sur un tout autre terrain (1979) : « est-elle donc si désirable, cette révolution ? » La question de la « désirabilité » de la révolution chasse celle de sa nécessité (au sens de besoin irrépressible né de contradictions systémiques) — une attitude qui révèle le désarroi politique et le désenchantement, résultat logique de l’investissement illusoire de l’espérance révolutionnaire dans ses avatars étatiques (URSS, Chine, etc.). Illusion qu’on retrouve, sous une autre forme, dans le soutien très peu critique du même Foucault à la révolution khomeyniste en Iran, prétendument nouveau paradigme révolutionnaire en rupture avec celui de 1789. Il ne s’agit pas, commente ironiquement Daniel, d’un dérapage, mais du test pratique d’une impasse théorique.

    Il faut aussi dépasser les rêves d’un exode hors du système : la destruction de ce monde — celui du capital — ne peut être qu’immanente. Il faut s’installer dans la contradiction, la travailler de l’intérieur. Mais le refus du monde existant, et le désir d’un « autre monde possible » mis en avant par le mouvement altermondialiste reste utopique, en tant que « sens non pratique du possible » (définition de Henri Lefebvre). J’avoue préférer la définition de Karl Mannheim : utopie est tout ensemble de représentations ayant une fonction subversive par rapport à l’état des choses existant. Il me semble aussi que le mouvement altermondialiste a un sens très pratique du possible, en formulant une série de revendications très concrètes : suppression de la dette des pays du tiers monde, taxation des transactions financières, abolition des paradis fiscaux, etc.

    On ne peut comprendre le pouvoir du capital sans analyser le fétichisme de la marchandise. Le grand mérite de Lukacs a été — avant Henri Lefebvre — d’étendre à la vie quotidienne la critique marxienne du fétichisme et de l’aliénation. Grâce au concept de réification (Versachlichung), en partant du Capital — les « Manuscrits de 1844 » n’étaient pas encore publiés — et de Max Weber, Lukacs dénonce, dans « Histoire et Conscience de classe » (1923), la dictature du calcul, jusqu’à « la mesure de la démesure et la quantification de l’inquantifiable » (ici c’est Bensaïd qui parle).

    Cependant, tandis que Lukacs croyait — comme le montre encore « Dialectique et Spontanéité », sa réponse aux critiques « orthodoxes » de « Histoire et Conscience de classe » — à l’actualité de la révolution et au rôle décisif du facteur subjectif, lors de l’instant de décision, plusieurs de ses disciples semblent adhérer à une vision beaucoup plus sombre, où l’aliénation et la domination absorbent toutes les alternatives historiques. C’est le cas, en partie du moins, de Herbert Marcuse, qui regrette le déclin de « l’élément romantique » de la culture, « l’espace romantique de l’imagination », source du « grand refus » opposé au monde des affaires fondé sur le calcul et le profit. Je sais que Daniel se méfiait du romantisme — c’était un de nos sujets de discussion — mais il semble ici accepter, sans trop de réserves, l’argument de l’auteur de « l’Homme unidimensionnel » (1964). En tout cas, pour Marcuse, « la porte étroite reste entrouverte par où peut encore faire irruption un possible intempestif » — une formulation superbe, plutôt inspirée par Walter Benjamin que par Herbert Marcuse, qui résume bien la vision de l’histoire de Bensaïd.

    Tandis que Marcuse cherche à l’extérieur du système, chez les exclus, les parias et les outsiders, le sujet possible d’un combat anti-systémique, Henri Lefebvre propose de camper au cœur de la contradiction pour la travailler de l’intérieur. Il avait compris que le seul moyen pour briser le cercle de la domination et déchirer le voile de l’idéologie c’est la praxis, les pratiques des opprimés ; c’est pourquoi à ses yeux « l’idée de révolution reste intacte ».

    On retrouve le pessimisme de Marcuse dans les écrits de Guy Debord, chargés d’une sombre mélancolie : « Nous tournons en rond dans la nuit, dévorés par le feu » (titre d’un de ses plus beaux textes et films). Convaincu de « la défaite de l’ensemble du projet révolutionnaire » dès les années 1930, Debord dénonce dans le « spectacle intégré » l’élimination systématique de l’histoire et l’anéantissement de tout projet critique. Son grand mérite, selon Bensaïd, est d’avoir perçu la tentation du déterminisme scientifique comme la brèche dans la pensée de Marx par où a pu s’engouffrer « l’idéologisation du marxisme ».

    Cette vision infernale de l’éternité marchande est poussée à l‘extrême par Baudrillard, Agamben, Surya, Holloway. Bensaïd oppose à cette « radicalité sans politique » la pensée stratégique, qui cherche une issue dans les pratiques, la crise, le parti. C’est le titre d’un dernier chapitre qu’il n’a pas eu le temps d’écrire…

    Michael Löwy

    Daniel Bensaïd : Le Spectacle, stade ultime du fétichisme de la marchandise — Marx, Marcuse, Debord, Lefebvre, Baudrillard, éd. Lignes, Paris 2011, 16 euros.


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