• Le temps était au froid, brumeux, ce jour de Noël 1920 quand les 285 délégués du XVIIIe congrès de la Section française de l'Internationale ouvrière (SFIO) ont emprunté la rue nationale jusqu'à la salle du manège de Tours, décorée d'un buste du fondateur disparu, Jean Jaurès, et surplombée d'une large banderole proclamant «Prolétaire de tous pays unissez-vous».

     

    Dès l'ouverture des travaux, en début de matinée du samedi 25 décembre, l'ambiance est électrique, l'ordre du jour modifié, les discours parfois à peine audibles, entre les partisans de la Russie soviétique, conduits par Louis-Oscar Frossard et Marcel Cachin, et les tenants d'une ligne plus réformatrice, emmenés par Léon Blum.

    Tous doivent répondre à une question cruciale: faut-il adhérer à la IIIe Internationale, fondée par les Bolcheviks qui ont pris le pouvoir à Moscou? Les débats vont durer six jours, exténuants, tendus, comme en témoigne Blum qui lance à la salle: «J'ainaturellement une voix très faible. Je suis, d'autre part, trèsfatigué, comme vous tous, et il me serait matériellement impossible desurmonter par la force de mon gosier et de mes poumons le tumulte etles interruptions violentes.» Mais l'issue du vote ne fait guère mystère. Et Blum le sait. Ses premiers mots: «Jedemande au congrès d'avoir égard à ce qu'il y a d'ingrat dans la tâcheque mes camarades m'ont confiée devant une assemblée dont la résolutionest arrêtée, dont la volonté d'adhésion est fixée et inébranlable.»

    Il sait que les représentants des 89 fédérations, dont celle d'Oran, de Tunisie ou des «camarades annamites», qui se sont relayés à la tribune ont déjà dit qu'ils étaient majoritairement favorables à l'alignement sur Moscou. Il sait que la Grande guerre, et l'Union sacrée finalement votée par les héritiers de Jaurès, ont laissé des traces profondes, particulièrement auprès des jeunes militants, nombreux dans la salle du Manège. Il sait aussi qu'ils pensent pour partie que les errements de la direction socialiste sont dus à sa forte composante intellectuelle, et qu'ils rêvent de révolution.

    «Vous êtes jeunes, camarades», leur lance Marcel Sembat. Cachin, lui, raconte son voyage en Russie: «Nous avons vu vivre la grande nation. (...) Et nous avons assisté à un spectacle qui devait nous émouvoir jusque dans nos fibres les plus intimes de socialistes chevronnés. C'est celui d'un grand pays, le plus grand de l'Europe, radicalement débarrassé de toute bourgeoisie, de tout capitalisme, dirigé uniquement par les représentants de la classe ouvrière et de la classe paysanne.» L'enthousiasme est de son côté.

    Blum lui termine, ému, un très long discours par ces mots: «Nous sommes convaincus au fond de nous-mêmes que, pendant que vous irez courir l'aventure, il faut que quelqu'un reste garder la vieille maison. (...) C'est sans doute la dernière fois que je m'adresse à beaucoup d'entre vous et  (...) il faut pourtant que cela soit dit. Les uns et les autres, même séparés, restons des socialistes; malgré tout, restons des frères, des frères qu'aura séparés une querelle cruelle, mais une querelle de famille, et qu'un foyer commun pourra encore réunir.»

    Le 30 décembre à Tours, les «frères» se séparent, la Section française de l'Internationale communiste (SFIC) est née, préfigurant le PCF. La motion favorable aux thèses bolcheviques a recueilli 70% des mandats.


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    *olivier fait sa tournee a Neuilly

    http://www.youtube.com/watch?v=x9c1QTGP-4g


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